L’industrialisation demeure un défi majeur pour la poursuite de la transformation structurelle de l’économie. Pour relever ce défi, plusieurs politiques, réformes, stratégies et projets structurants ont été mis en œuvre à l’effet d’assurer le plein développement du secteur industriel en Côte d’Ivoire, notamment la transformation de ses matières premières agricoles.

De fait, l’agroalimentaire se pose comme une composante clé des industries manufacturières, et constitue l’épine dorsale de la transformation structurelle de l’économie. En effet, le pays dispose d’un important potentiel de diversification de son tissu industriel à travers la transformation de ses principales matières premières agricoles (cacao, café, cajou, sucre, palmier à huile, mangue, ananas…) qui permettrait d’impulser par ailleurs le développement des autres industries manufacturières (cosmétique, pneumatique, chimique, textile, pharmaceutique, biocombustible...).

Sur la base des potentialités du secteur agricole de la Côte d’Ivoire, le Gouvernement ivoirien a identifié l’agroalimentaire comme l’une des sept (07) grappes industrielles à développer.

L’objectif est de parvenir à un développement intégré de la chaîne agroalimentaire pour rehausser sa contribution à la croissance, la création d’emplois décents, mais aussi à la réduction de la facture des importations de produits alimentaires, ainsi qu’à la diversification et l’accroissement des exportations. Il s’agira :

  • en amont, de développer les industries de fabrication des intrants (engrais et petits matériels et outils de production agricole) ;

  • en aval, développer les industries de transformation des produits agricoles pour la consommation domestique et pour l’exportation, et des services de distribution/commercialisation des produits et ;

  • en appui transversal, de développer les services de recherche, les instruments de financement de la production et de l’investissement, de transport et de distribution des produits.

De façon opérationnelle, la matérialisation de ces ambitions passera par (i) l’accroissement de la production et de la compétitivité industrielles, (ii) le développement des zones industrielles et (iii) l’amélioration de la qualité et le renforcement de la lutte contre la contrefaçon.

Ainsi, des mesures et actions incitatives ont été prises par le Gouvernement pour accroitre la production agroalimentaire locale et stimuler les investissements.

Il s’agit, entre autres de :

  • l’adoption de l’ordonnance n°2020-09 du 08 janvier 2020 portant réduction du taux de droit unique de sortie applicable aux produits des entreprises de transformation de cacao qui a permis la signature de sept (7) conventions avec les broyeurs du cacao assorties d’engagements ;

  • l’adoption de l’ordonnance n°2019-587 du 03 juillet 2019, instituant des mesures fiscales incitatives dans le secteur de la transformation de l’anacarde qui a permis la signature de 35 conventions avec les transformateurs de l’anacarde assorties d’engagements ;

  • l’adoption de l’ordonnance n°2019-826 du 09 octobre 2019 instituant des mesures fiscales incitatives spécifiques aux investissements réalisés dans le secteur de la transformation de l’hévéa qui a permis la signature de 28 conventions avec les usiniers assorties d’engagements ;

  • l’adoption et la mise en œuvre de l’ordonnance n°2022-536 du 16 juillet 2022 instituant des mesures fiscales incitatives spécifiques aux investissements réalisés dans les secteurs de la production et de la transformation agricole (vivriers et légumineuses) ;

  • l’adoption et la mise en œuvre du décret n° 2024-832 du 18 septembre 2024 déterminant les mesures incitatives au profit des opérateurs du secteur privé participant à l’aménagement durable des agro-forets et les modalités de ladite participation.

 

  • L’agroalimentaire en chiffres

L’agroalimentaire est la première branche du secteur secondaire en termes de valeur ajoutée avec une part de 28,8% en 2015. En 2024, elle occupe toujours la première place avec une part de 23,6%. Sa valeur ajoutée est passée de 1 572,1 milliards de FCFA en 2015 à 2 826,7 milliards de FCFA en 2024, avec une croissance moyenne de 6,7 % par an.

 

 

Source : MEPD/ANStat, MEPD/DGE, MCI

Valeur ajoutée du secteur secondaire

 

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Secteur Secondaire

5 450,2

5 972,8

6 040,0

6 212,5

7 656,7

7 510,3

8 922,3

10 194,6

11 067,1

11959,0
Extraction minière

895,2

911,9

967,6

799,3

1 167,1

1 103,8

1 190,2

1 352,8

1 454,8

2 070,3

Industries 

agro-alimentaires

1 572,1

1 913,5

1 926,7

1 945,1

2 122,4

2 114,8

2 426,4

2 650,4

2 909,9

2 826,7

Produits 

pétroliers

124,2

273,8

175,9

347,0

595,7

493,3

924,9

1 470,3

1 817,3

916,6

Energie 

(gazeaulec)

239,4

318,5

267,2

436,6

541,6

483,1

573,2

638,7

788,4

681,8
BTP

1 219,5

1 144,2

1 364,5

1 306,3

1 589,4

1 551,2

1 750,9

2 058,6

2 281,3

2 188,8

Autres industries 

manufacturières

1 399,8

1 410,8

1 337,9

1 378,1

1 640,6

1 764,1

2 056,7

2 170,8

2 493,2

3 274,8

Sources :MEPD/ANStat, DGE

 

L’agro-alimentaire est dominée par quatre (04) filières représentant plus de 85% du chiffre d’affaires du secteur en 2017. Il s’agit des filières (i) cacao et du café (32%), (ii) oléagineux (23%), (iii) laitier et fruits et légumes (21%) et (iv) boissons (10%). Les filières céréalières, de transformation de viandes et poissons et du tabac représentent 15% du chiffre d’affaires du secteur.

Les filières prioritaires du Gouvernement en matière de transformation agroalimentaire sont le cacao, le café, la noix de cajou, l’huile de palme, les fruits et légumes (mangue, ananas, banane dessert, etc.) et le sucre.

  • La transformation du cacao

L’objectif du Gouvernement est de transformer localement au minimum 50% de la production de fèves de cacao d’ici 2030 et de développer la production de chocolat et autres produits finis à base de cacao.

En 2024, le secteur compte 11 entreprises actives avec 14 unités industrielles. Ainsi, sur la période 2017 à 2024, la capacité globale de broyage des unités installées est passée de 730 000 tonnes à 972 040 tonnes, soit une croissance de 33,2%. Cette capacité est de 1 022 040 tonnes/an avec l’entrée en production de l’usine de TRANSCAO à Abidjan en 2025 d’une capacité de 50 000 tonnes/an. Par ailleurs, avec l’achèvement des travaux de construction des usines JB COCOA à Abidjan, les travaux d’extension de TRANSCAO SEWEKE, Atlantique COCOA CORPORATION et la réhabilitation de l’ex-usine SUCSO par la SITC à San-Pedro, cette capacité devrait être portée à 1 112 040 tonnes. Ces principaux projets industriels en cours portent en effet sur une capacité installée de 140 000 tonnes.

Les principaux acteurs du secteur sont SACO, Olam, CARGILL, Cemoi, Ivory Cocoa Product et Choco-Ivoire.

Les volumes de fèves transformées sont passés de 576 994 tonnes en 2017 à 786 769 tonnes en 2023, soit une progression de 5,3% en moyenne par an. En 2024, ce volume présente un repli de 6,07% pour se situer à 739 027 tonnes, suite à la baisse prononcée de la production de 23,68%. Quant au taux de transformation, il progresse au regard de l’objectif 2030. Il est passé de 28,6% pour la campagne 2016-2017 à 42,0% pour la campagne 2023-2024.

 

Tableau 2 : Capacité installée et transformation du cacao

Désignations

2016-

2017

2017-

2018

2018-

2019

2019-

2020

2020-

2021

2021-

2022

2022-

2023

2023-

2024

Capacités installées 

(Tonnes fèves /An)

730 000

730 000

800 000

850 000

880 000

930 000

972 040

972 040

Quantité broyée 

(Tonnes Fèves)

576 994

559 239

604 817

596 388

619 529

750 247

790 800

739 027

Taux de

 transformation

28,57%

28,47%

27,41%

27,66%

26,37%

31,26%

38,51%

42,0%

 Sources :Conseil Café-Cacao 

 

  • La transformation du café

Le secteur de la transformation des cerises de café robusta en café soluble est dominé par l’entreprise NESTLE avec une capacité installée de 9 000 tonnes et le Groupe Carré d’or. En 2024, le secteur de la torréfaction du café compte 32 torréfacteurs identifiés. Le volume du café transformé est passé de 18 870 tonnes pour la campagne 2021-2022 à 15 560 tonnes pour la campagne 2023-2024, soit une baisse de 9,3% en raison de la baisse de la production nationale. Pour la campagne 2023-2024, le taux de transformation est de 15,0%.

 

Tableau 3 : Transformation du café

Campagnes

2016-2017

2017-2018

2018-2019

2019-2020

2020-2021

2021-2022

2022-2023

2023-2024

Quantité transformée (Tonnes)

9 768

6 224

12 102

12 035

17 014

18 870

15 795

15 560
Taux de transformation (%)

22

21

13

14,43

27,43

19,88

33,65

15,0

 Sources :Conseil Café-Cacao 

  • La transformation de la noix de cajou

La filière anacarde en Côte d’Ivoire est aujourd’hui une des plus importantes filières agro-industrielles en raison du positionnement du pays au niveau mondial en termes de production (1er producteur mondial) et de son poids dans l’économie nationale (2ème produit agricole d’exportation). L’objectif du Gouvernement est d’atteindre un taux de transformation de 50% d’ici 2030.

La Côte d’Ivoire dispose de 34 unités de transformation opérationnelles, faisant passer la capacité nominale globale de 77 384 tonnes en 2014 à 450 000 tonnes en 2024. Une dizaine de projets d’installation d’unités sont en cours de déploiement et pourraient faire passer la capacité de transformation à 500 000 tonnes/an.

Les principaux intervenants sont Olam Ivoire, Ivoirienne Noix de Cajou et SITA.

Le volume de noix de cajou transformées localement est passé de 37 696 tonnes en 2014 représentant un taux de transformation de 6,7% à 344 028 tonnes en 2024 représentant une transformation de 36,4%. Le volume de noix de cajou transformées localement a augmenté en moyenne de 24,6 % par an entre 2014 et 2024.

Cette performance permet à la Côte d’Ivoire d’être en 2024, le 3ème pays transformateur mondial de noix de cajou et le 2ème fournisseur mondial d’amandes de cajou après le Vietnam.

Tableau 4 : Capacité installée et taux de transformation de noix de cajou

Désignations

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Capacités installées

 (Tonnes NBC/An)

77 384

95 949

104 500

109 500

167 300

199 300

214 500

214 500

214 500

350 000

450 000

Quantité transformée

 (Tonnes NBC)

37 696

41 012

40 383

44 628

68 515

57 466

103 101

136 854

224 036

265 863

344 028

Taux de 

transformation

6,7%

5,8%

6,2%

6,3%

9,2%

9,3%

12,2%

14,1%

21,8%

21,7%

36,4%

 Sources :Conseil Coton Anacarde 

  • La production de l’huile de palme brute et de l’huile de palme raffinée

     

Le Gouvernement ivoirien ambitionne de situer le Palmier à Huile comme une filière très importante dans le développement économique du pays.

La filière huile de palme est fortement concentrée et intégrée avec 16 complexes agro-industriels régulés par l’Association Interprofessionnelle de la filière Palmier à Huile (AIPH) et intervenant dans la 1ère et 2ème transformation. Les principaux acteurs sont PALMCI, Palm Afrique, SIPEFCI, SOGB et des huileries indépendantes.

Toute la production de palmier à huile fait l’objet d’une 1ère transformation. Le volume d’huile de palme produit est passé de 447 200 tonnes en 2015 à 495 983 tonnes en 2024. Comparé à 2023, ce volume a baissé de 11,8% en 2024.

 

Tableau 5 : Production d’huile de palme brute (en milliers de tonnes)

Désignation

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Huile de Palme brute

447,2

453,2

482

513,9

535,4

514,5

601,3

541,5

562,6

495,9

Sources :Conseil Hévéa Palmier à Huile

Au niveau de la 2ème transformation, la capacité de raffinage de l’huile de palme brute est de 2 900 tonnes par jour en 2024. Cependant, il reste un potentiel dans la fabrication de produits beaucoup plus élaborés.

Le secteur de 2ème transformation est dominé par le groupe SIFCA, à travers ses filiales PALMCI et SANIA et la Société Africaine de Raffinage en Côte d’Ivoire (SARCI). Ces sociétés sont présentes de l’exploitation des plantations de palmier à huile à la transformation d’huile de palme brute en huile de palme raffinée.

La production nationale d’huile de palme raffinée est passée de 3 320 000 hectolitres (hl) en 2015 à 3 632 000 hl en 2022, soit une hausse de 1,34% en moyenne annuelle.

 

Tableau 6 : Production nationale d'huile de palme raffinée

Désignation

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Huile de palme raffinée (En milliers hl)

3 320

3 634

3 321

6 077

4 918

4 032

3 321

3 632

NDND

Sources :MEPD/ANStat, DGE

  • La filière sucre

La filière sucre est fortement intégrée et concentrée, avec une organisation en duopole constituée par les sociétés SUCAF et SUCRIVOIRE détenant chacune deux (02) complexes agro-sucriers. Le marché domestique du sucre est protégé par l’interdiction d’importation de sucre sauf levée temporaire de l’Etat (Ordonnance n°2021-299 du 16 juin 2021, fixant les conditions d’importation du sucre destiné aux entreprises industrielles l’utilisant comme intrant).

La production locale est de 212 034,0 tonnes en 2024 contre à 198 649,7 tonnes en 2015. La couverture du besoin national est passée de 70% en 2016 à 88% pour un besoin estimé à 240 000 tonnes en 2024.

L’objectif du Gouvernement est de faire en sorte que ces deux unités permettent au pays d’être autosuffisant en sucre. Par conséquent, l’Etat a conclu des contrats-plan avec les sucriers portant sur l’accroissement de la production nationale.

Tableau 7 : Production de sucre (en milliers de tonnes)

Désignation

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Production du Sucre

198,6

188,0

191,6

186,6

190,6

207,2

180,6

189,8

203,7

212,0

Sources :SUCAF et SUCRIVOIRE

  • La transformation des fruits et légumes

Pour le développement de la transformation des fruits et légumes, le Gouvernement a porté son attention sur : (i) la promotion de la conservation et de la production de jus de fruits et de fruits secs, (ii) la sécurisation de l’approvisionnement des unités de transformation des produits et (iii) l’amélioration de la capacité de stockage et de conservation.

L’industrie fruitière est dominée par les filiales de groupes français dont SELECTIMA, Compagnie fruitière et la Société agricole Kablan-Joubin, qui traitent localement le conditionnement et la transformation de fruits en jus, avant de les exporter vers l’Europe. En 2021, on note l’arrivée de la Société TRAFULE. Ce secteur est marqué par l’abondance et la disponibilité de la matière première, notamment la banane désert (1er producteur africain), la Banane plantain (6ème producteur africain), la cola (1er producteur africain), l’ananas et la Mangue (1er exportateur africain de fruits vers l’Europe) avec un taux de transformation locale estimée à moins de 5%.

Mangue

Les principaux produits transformés sont la mangue séchée et le jus. La mangue séchée est le principal axe de valorisation de la mangue en Côte d’Ivoire car elle représente 67% du volume total de mangues transformées. Le volume de mangues séchées est passée de 89 tonnes en 2017 à 593 tonnes en 2023, soit une croissance moyenne annuelle de 36,6%. En 2023, la Côte d’Ivoire occupe le 1er rang au niveau africain et le 3ème rang au niveau mondial en matière de transformation de la mangue. L’objectif est de porter le taux de transformation à 15 % en 2025 contre un taux en-dessous de 2 % en 2017.

 

Tableau 8 : Indicateur de l'industrie agroalimentaire

 

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

2023

2024

Part dans le PIB total (%)

5,8

6,7

6,3

6,0

6,0

5,8

6,0

6,1

6,1

5,4
Part dans le PIB du secteur secondaire (%)

28,8

32,0

31,9

31,3

27,7

28,2

27,2

25,6

24,8

23,6

Sources :MEPD/DGE

 
  • Perspectives

A court terme, l’Etat envisage accélérer le développement du secteur Agroalimentaire par :

  • la poursuite des travaux de réhabilitation et d’aménagement des zones industrielles à Abidjan et à l’intérieur du pays ;

  • la poursuite des travaux de mise en place des clusters industriels dans les filières agro-industrielles ;

  • la poursuite de la mise en œuvre du projet de développement de l’industrie 4.0 incluant les nouvelles technologies ;

  • la poursuite de la mise en œuvre du programme sur la stratégie de développement de la transformation de l’anacarde ;

  • la poursuite des actions d’appui à la transformation des autres produits agricoles notamment le cacao, les fruits et légumes, etc. ;

  • la création et l’opérationnalisation du Fonds de Développement Industriel ;

  • la mise en place des Centres d’Appui à la Compétitivité et au Développement Industriel (CACDI) ;

  • la mise en œuvre de la politique d’innovation et de vulgarisation des technologies ;

  • la poursuite des travaux de valorisation des farines locales avec la mise en œuvre du projet relatif à la fabrication du pain composé utilisant les farines locales de maïs et du manioc (I2T) ;

  • la poursuite des actions relatives au développement du Système Ouest Africain d’Accréditation (SOAC), notamment la mise en place du système d’entreposage (SRE) ;

  • la mise en œuvre d’un Programme pour le Développement Industriel Inclusif et Durable du PCP ;

  • la poursuite de la mise en œuvre du projet Diversification, Accélération industrielle, Compétitivité et Emploi (DAICE).